dimanche 30 décembre 2007

HUMILIATION...

...sur fond de ski de fond.

Quelque part entre 1976 et 1985... Au fait, pourquoi a-t-on appelé le ski de fond "ski de fond"? Ski, je peux comprendre... vieux mot des lapons ou des finlandais désignant les deux planches de bois... mais Fond? Et pourquoi pas Fonds? Les Anglais disent: "Cross-country ski", ce qui me semble plus évocateur. Wikipedia n'en dit pas un mot. Le même mystère s'applique à "slalom spécial" et "slalom géant"... Qu'a de "spécial" ce slalom? Et pourquoi cet autre serait-il "géant" quand il n'y en a pas de "nain"? Et pourquoi n'y a-t-il pas de "slalom régulier" ou de "slalom normal"? Autre mystère qui me hante...

Donc, quelque part entre 1976 et 1985. Club de ski de fond "Bec-Scie". Bec-Scie, c'est le nom d'une espèce de canard qui vit en Amérique du Nord, et au Québec notamment. Mais c'est aussi le nom que certains exaltés ont donné au club de ski de fond baieriverain, c'est-à-dire l'endroit où les gens de la Baie vont faire du ski de fond en hiver. Pourquoi "Bec-Scie"? Ca n'est pas évident... C'est même plutôt obscur... Le site n'est pas réputé pour héberger une colonie de Bec-Scie. Voilà pourquoi je parle "d'exaltés"... Je n'ai pas osé utiliser le terme "hurluberlus"... Les canards ne font pas de ski de fond! A fortiori, ils s'enfuient du Bec-Scie dès les premiers souffles du vent d'hiver... Quand ils amerrissent, les canards glissent quelques centimètres sur leurs pieds palmés. Ils freinent, finalement, en marchant à petits pas sur l'eau. "Pas alternatif". Nos hurluberlus ont sans doute vu là le lien avec le ski de fond...

La rivière à Mars est éclusée au Bec-Scie. Sur plusieurs kilomètres, elle est devenue un lac, qu'on aurait pu appeler "FILIFORME". Les pistes de ski de fond sont là, tant sur la surface glacée du lac que sur ses berges. C'est là que j'ai été heureux... D'abord sur les skis de mon frère, et ensuite sur les miens. Des heures de bonheur, à glisser, regarder, humer, respirer, réfléchir.

Ce matin-là, j'étais en grande forme. Au point où je me voyais représenter le Canada aux prochaines olympiades d'hiver. Il y a un ruisseau qui se décharge dans le lac Filiforme. J'en ai oublié le nom. Je me demande si ce n'est pas le ruisseau "Frette"... Mais rien n'est moins certain. Je skiais donc sur le ruisseau Frette, en direction du lac Filiforme. Grande et fière allure. Le soleil est à son zénith, il vente un peu, je porte la veste rouge que mes parents m'ont offerte en cadeau de Noël dix ans plus tôt. Je sens tout à coup qu'on skie derrière moi. Sorte de sixième ou septième sens. La "sensation" se rapproche. J'accélère, pour ne pas me faire dépasser. Car je suis un compétiteur, je l'ai toujours été! La "sensation" souffle derrière mes oreilles! Je dois m'incliner: je fais un pas de côté, pour laisser le passage, ainsi que le commande l'étiquette. Un quidam drôlement habillé me dépasse. Je lui dis bonjour. Il grommelle une réponse en s'éloignant. Je note au passage un crissement métallique qui s'accorde au diapason du pas alternatif de ce champion olympique. Je me dis tout bonnement que sa fixation frotte... et je continue mon chemin, allègrement, quoique humilié légèrement. Cinq cent mètres plus loin, voilà mon adversaire arrêté, penché vers sa jambe droite qu'il semble examiner. Je m'arrête:
-Y a-t-il quelque chose qui ne va pas? Etes-vous blessé? Puis-je vous aider?
-J'ai un trouble dans ma jambe de bois. Mais, ça va aller, continuez votre route.

Je ne sus que rétorquer. Ca, c'était bien moi. Dépassé par un gars avec une jambe de bois! Je devais être le seul au Saguenay-Lac St-Jean à qui c'était arrivé! C'était donc ça, le crissement... Je terminai ma course, désillusionné. Adieu aux jeux olympiques!

Arrivé au chalet, n'en croyant toujours pas mes yeux, je m'enquis:
-Est-il possible que j'aie croisé en chemin un gars avec une jambe de bois?
-Certainement, c'était Rémi Tremblay, un gars de Bagotville. A perdu sa jambe dans un accident de ferme quand il était jeune. Il vient ici tous les jours.

Delhorno

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